Qui suis-je?
Enseignant-chercheur ou chercheur en éducation ?
Lors de chacune de mes interventions publiques, les organisateurs me demandent immanquablement – comme à tous les collègues sans doute – comment je souhaite être présenté. Certains disposent peut-être d’une réponse toute faite et invariable, mais pour ma part, j’y réfléchis à chaque fois, d’autant que je ne peux pas me référer à une quelconque section du Conseil des universités, cette instance n’existant pas en Belgique.
Un symptôme ?
La science de l’éducation, devenue « sciences de l’éducation », et les didactiques, qui portent en elles des éléments normatifs – au même titre que de nombreuses autres disciplines orientées vers la formation professionnelle, y compris de haut niveau, comme dans le domaine de la médecine par exemple –, suscitent aussi le rejet de ceux qui considèrent l’enseignement plutôt comme une sorte d’art lié principalement à des caractéristiques personnelles, peu susceptibles de s’apprendre ou de se transmettre, et des connaissances disciplinaires. Cette conception s’accompagne du refus d’être évalué autrement que par ses pairs et en dehors de la maîtrise de sa propre discipline. Il n’est donc pas question de prendre en compte les résultats des élèves – ces derniers devant s’adapter à l’enseignant, et non l’inverse – et encore moins de leurs appréciations pour examiner les compétences professorales. Dans cette perspective, il convient également d’éviter le formatage excessif d’une formation professionnelle tournée vers le « comment enseigner ». Il est dès lors difficile d’imaginer une évolution importante de la situation de notre école, qui est pourtant loin d’être totalement satisfaisante, si vous permettez cet euphémisme.
Ce texte a été publié sous: Demeuse, M. (2018). Enseignant-chercheur ou chercheur en éducation?. Diversité. Revue d'actualité et de réflexion pour l'action éducative, 192, 47-50
[1] J’ai par exemple tenté, en vain, d’additionner neuf cognitivistes, un informaticien, un statisticien, un mathématicien, un économiste, un philosophe, trois spécialistes des sciences de l’éducation et deux sociologues, mais le compte n’y est pas… il manque encore deux membres au Conseil scientifique, d’après les chiffres de Monsieur Pommier (https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=1969793153286030&id=1751992818399399).
[2] Rapport du Groupe de travail « tronc commun » de l’Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique et intitulé « Rapport sur l’implémentation d’un tronc commun dans l’enseignement obligatoire » (2018) http://www.academieroyale.be/academie/documents/RapportARB_tronccommun28093.pdf
[3] Groupe de travail sur le financement de l’enseignement supérieur en Communauté française de l’Académie royale de Belgique, premier rapport intermédiaire remis au Secrétaire perpétuel le 15 juillet 2011. http://www.cref.be/communication/20110715_Rapport_fin_Acad_royale.pdf
[4] Kahn P. (2006), « La critique du ‟pédagogisme” ou l’invention du discours de l’autre », Les Sciences de l’éducation – Pour l’Ère nouvelle, vol. 39, n° 4, p. 81-98.
Lors de chacune de mes interventions publiques, les organisateurs me demandent immanquablement – comme à tous les collègues sans doute – comment je souhaite être présenté. Certains disposent peut-être d’une réponse toute faite et invariable, mais pour ma part, j’y réfléchis à chaque fois, d’autant que je ne peux pas me référer à une quelconque section du Conseil des universités, cette instance n’existant pas en Belgique.
Je ne crois pas souffrir d’un trouble de
la personnalité et je pense avoir une idée assez précise de ce qui m’occupe
généralement, d’un point de vue professionnel. Pour moi, le problème réside
dans la manière dont cette brève présentation sera reçue, l’effet qu’elle
produira sur l’auditoire et l’influence qu’elle aura sur son écoute. Il ne s’agit
pas de satisfaire un besoin narcissique, de trouver le titre le plus ronflant
pour faire autorité, mais de trouver ce qui qualifie le plus justement mon
intervention.
Vous pensez peut-être, à ce stade, que c’est
là faire grand cas de quelques mots, alors que c’est surtout le propos à venir qui
importe. C’est aussi, en grande partie, mon avis mais je me suis récemment
rendu compte de l’importance de la « carte de visite » sur la manière
dont ce qui sera énoncé sera reçu – attendu avec le plus grand intérêt ou discrédité
d’entrée de jeu, par exemple.
Ayant été invité il y a peu à rejoindre
le Conseil scientifique de l’Éducation nationale en France, j’ai été rapidement
confronté à des lectures auxquelles ma situation, en Belgique francophone, ne m’avait
pas préparé. Lors d’un premier contact avec le ministère, j’avais indiqué que j’étais
professeur à l’Université de Mons et que j’avais une formation en psychologie
et en statistique. Sur la fiche de présentation en ligne, je suis devenu
« professeur en psychologie et statistique », ce qui ne correspond
pas vraiment à ce que j’enseigne, mais bien à ma formation initiale et à ce qui
figure sur mes diplômes. Pour tout dire, je pense avoir consacré la
quasi-totalité de ma carrière universitaire au domaine de l’éducation, dans une
faculté de psychologie et des sciences de l’éducation, au sein de formations en
sciences de l’éducation ou dans le domaine de la formation des enseignants, y
compris en France.
Conseil scientifique ou inventaire à la Prévert
Malgré ces quelques approximations, cette
question ne me semblait pas très importante, mais je n’avais pas bien anticipé
les réactions à la mise en place d’un tel conseil et encore moins la frénésie
que le comptage des titres et la répartition des effectifs entre disciplines
allaient entraîner. J’ai donc lu avec beaucoup d’attention les prises de
position des uns et des autres et – on ne se refait pas – je me suis
un peu étonné des problèmes arithmétiques insolubles auxquels chacun des
protagonistes était confronté lorsqu’il s’agissait de répartir les membres du
Conseil scientifique en catégories et les compter. En effet, pour compter, il
faut savoir ce que l’on compte et, en matière d’activité scientifique, les
choses ne semblent pas simples.
Je dois aussi avouer que j’ai été tour à
tour fort surpris, parfois amusé et surtout indigné par certaines
interventions, dont la salve nourrie d’un certain Gérard Pommier[1],
directeur de recherche à l’université Paris-VII et psychanalyste. Je n’en ai
pas fait une affaire personnelle et je ne reprendrai pas ici les réponses de
certains collègues soulignant l’inanité de ses propos, convoquant allègrement
« eugénisme » et « période noire de notre histoire » en
guise d’arguments, émaillant ceux-ci, par exemple, de considérations
« poétiques » sur le lien entre noyau familial et comptage…
Ma première réaction a été de considérer heureuse
l’initiative du ministre de l’Éducation nationale de s’entourer d’un conseil
composé de scientifiques… Il choisit les membres de ce conseil, c’est sa
prérogative, et ils sont identifiés, cela évitera sans doute quelques conflits d’intérêt
méconnus. Les critiques portent principalement, sauf chez Monsieur Pommier, sur
le « dosage » ou l’absence de certaines disciplines, pas vraiment sur
les qualités scientifiques des différents membres.
Je suis assez mal placé pour juger de
nécessaires équilibres au sein de ce conseil et je ne sais pas très bien sur
quelle base cela pourrait être sérieusement réalisé, en dehors sans doute du
fait que les membres du conseil possèdent quelques qualités reconnues dans le
domaine de la recherche scientifique en éducation ou dans des disciplines
contributives. Nombreux pourtant sont ceux qui considèrent que « le compte
n’y est pas ».
En démocratie, il est normal de commenter
chaque décision politique… Les critiques des collègues devraient pourtant
pouvoir être portées sur des faits plutôt que sur des proportions. Qu’a donc à
son actif le Conseil scientifique, avant même son installation ou ses premiers
travaux, qui mérite les critiques que j’ai pu lire ? Comme son nom l’indique,
son rôle est celui de conseiller et d’éclairer le ministre, pas de s’y
substituer, et il n’aura pas plus d’influence que celle que chacun voudra bien
lui accorder. Mais j’entends déjà certains collègues me dire que je suis bien
naïf.
Quelle méthode ?
Pour être tout à fait honnête et regarder
« dans mon propre jardin », je me suis rappelé d’un récent document
émanant de l’Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de
Belgique relatif à une question d’éducation, et je me suis posé le même type de
questions que celles que j’ai pu lire à propos des travaux du Conseil
scientifique [2]. Ce
groupe compte des membres des différentes classes de l’Académie, dont un
spécialiste de l’intelligence artificielle, un politologue, un spécialiste de
relations entre art et spiritualité, un chimiste, un historien, quatre
ingénieurs, une biologiste et géologue, une peintre, un mathématicien, un
ingénieur architecte, une neurophysiologiste, un géographe et un archéologue…
mais aucun spécialiste de l’éducation. Ce dernier point n’est cependant pas
celui qui m’a le plus surpris, connaissant la faible représentation de ce champ
au sein de l’Académie. Ce ne sont pas plus les conclusions, plutôt convenues,
qui ont attiré mon attention, non, c’est l’absence de méthode explicite ou de
références scientifiques pour arriver à ce rapport ou, plus exactement, à l’expression
de cet ensemble d’opinions. S’il est heureux que l’Académie se prononce sur des
faits de société – ici la prolongation du tronc commun dans l’enseignement
obligatoire –, on se réjouirait bien plus si elle offrait au lecteur une
argumentation étayée, tel que cela avait été proposé, par exemple, dans un
précédent rapport sur le financement de l’enseignement supérieur [3].
Le plus important, pour moi, ce n’est
donc pas la composition d’une assemblée, pour autant que ses membres possèdent
quelque légitimité scientifique – ce qui est indubitablement le cas des
collègues de l’Académie royale –, mais c’est le produit délivré et la
méthode pour y parvenir. Sur ce point, je pense qu’il faut accorder encore un
peu de temps au Conseil scientifique pour en apprécier, ou pas, les
productions.
Un symptôme ?
Cette entrée en matière illustre, à mon
avis, les difficultés que nous rencontrons souvent dans le domaine des sciences
sociales et, en particulier, dans celui de la recherche en éducation. Ce
domaine est-il un champ particulier de la recherche, ouvert à différentes
disciplines, ou un domaine réservé qui institue, en quelque sorte, une
discipline ? Pour le dire autrement, parle-t-on de recherche en éducation
ou de science(s) de l’éducation ? Qui donc est autorisé à parler de l’Ecole ?
Sous quel angle ? Celui de ses disciplines scolaires ? Celui de son
fonctionnement comme institution ? Celui de ses valeurs ? Celui des
apprentissages qui s’y réalisent ? Celui de ses acteurs ?...
Toutes ces questions ont du sens et c’est
bien ce qui pose problème. L’objet est complexe et nous n’en percevons chacun
qu’une partie, compte tenu de nos méthodes d’investigation et de notre
appartenance disciplinaire. Vouloir imposer notre point de vue comme seule
interprétation possible nous conduirait à des discussions stériles et sans
issue.
Mais, comme chacun le sait, l’éducation
est l’affaire de tous et aussi de valeurs. Il est donc difficile, pour
certains, de considérer que l’éducation et l’école peuvent constituer des
objets d’étude scientifique. L’idée n’est d’ailleurs pas vraiment acceptée par
ceux qui en font leur fonds de commerce dans les médias, comme chroniqueurs ou
« intellectuels attitrés ». Les débats, souvent bien peu
scientifiques et parfois fort peu civils, par exemple entre
« pédagogistes » et « républicains », en témoignent.
Si on se réfère, par exemple, au texte de
Pierre Kahn [4], ces
derniers se méprennent sur toute la ligne et l’antipédagogisme [5]
semble plutôt, dans sa forme actuelle, une réaction qui s’est construite à partir
des années 1960, et peu compatible avec la position des républicains
contemporains de Jules Ferry, lorsqu’ils soutenaient la naissance de la science
de l’éducation et de la pédagogie. Le « refus de tout propos constitué qui
prend ces manières d’enseigner pour objet », de la part de ceux qui se
proclament républicains, a pour conséquence logique l’impossibilité de
transmettre tout savoir construit et validé sur la manière d’enseigner,
notamment lors de la formation des enseignants. Les seuls savoirs transmissibles
sont, pour eux, les contenus disciplinaires qui devront être enseignés.
La science de l’éducation, devenue « sciences de l’éducation », et les didactiques, qui portent en elles des éléments normatifs – au même titre que de nombreuses autres disciplines orientées vers la formation professionnelle, y compris de haut niveau, comme dans le domaine de la médecine par exemple –, suscitent aussi le rejet de ceux qui considèrent l’enseignement plutôt comme une sorte d’art lié principalement à des caractéristiques personnelles, peu susceptibles de s’apprendre ou de se transmettre, et des connaissances disciplinaires. Cette conception s’accompagne du refus d’être évalué autrement que par ses pairs et en dehors de la maîtrise de sa propre discipline. Il n’est donc pas question de prendre en compte les résultats des élèves – ces derniers devant s’adapter à l’enseignant, et non l’inverse – et encore moins de leurs appréciations pour examiner les compétences professorales. Dans cette perspective, il convient également d’éviter le formatage excessif d’une formation professionnelle tournée vers le « comment enseigner ». Il est dès lors difficile d’imaginer une évolution importante de la situation de notre école, qui est pourtant loin d’être totalement satisfaisante, si vous permettez cet euphémisme.
La recherche en éducation n’est pas une
aventure solitaire !
Les choses auraient sans doute pu en
rester là et les invectives répondre aux invectives si une troisième voie ne s’était
pas offerte, celle de l’evidence based
education[6].
Les termes « evidence based »
sont à présent associés à toutes les pratiques possibles et imaginables, de la
médecine à la politique. L’éducation n’échappe pas à cette approche, et c’est
sans doute heureux. Qui pourrait se plaindre du fait que les pratiques d’enseignement
et d’apprentissage soient construites sur des éléments de preuve, des
connaissances scientifiques, en dehors des « antipédagogistes » ?
Mais encore faudrait-il s’accorder sur la nature des preuves et la manière de
les établir. Et ce n’est naturellement pas tout ! Que faut-il faire lorsqu’il
n’existe pas assez d’éléments probants ? Et qui doit rapporter les
preuves ? Comment les rassembler ? Comment les organiser ?
Comment définir les limites d’application de telle ou telle connaissance ?
Et si des éléments contradictoires apparaissent ? Comment passer de la
connaissance d’éléments probants à leur mise en œuvre effective dans les
pratiques ?
Toutes ces interrogations ne
doivent-elles pas sérieusement poser la question d’une science de l’éducation,
ou bien faudrait-il imaginer un modèle intégrateur des différentes sciences
contributives ? Comment identifier le niveau d’explication et sa
contribution dans l’ensemble (est-ce plutôt un problème de type environnemental
ou au contraire un problème de type endogène ? quelle est la part des
gestes professionnels de l’enseignant et celle des mécanismes d’apprentissage ?
comment analyser les interactions entre les différents niveaux ?, etc.).
Plus fondamental encore, pour pouvoir
envisager ce type d’approche dans le domaine de l’éducation, il faudrait au
préalable intégrer le concept d’efficacité. Ce concept suppose la définition des
objectifs visés et leur opérationnalisation. Comment en effet juger d’une
pratique enseignante si on ignore ce qu’elle est supposée favoriser en matière d’apprentissage
chez les élèves ?
On le voit, le chantier de l’amélioration
de notre Ecole est immense. Au-delà d’un indispensable accord sur les finalités
de celle-ci, il suppose à la fois une maîtrise technique nécessaire, pour réaliser
des méta-analyses par exemple, des connaissances disciplinaires multiples et
des capacités à interagir avec des chercheurs d’origines disciplinaires et de
traditions scientifiques différentes et, surtout, la planification et la
coordination du travail d’ensemble. Compte tenu de toutes ces exigences, mais
aussi de l’importance de l’éducation, on peut rêver en ce domaine d’une
structure comparable, par exemple, au CERN (Organisation européenne pour la
recherche nucléaire)… un jour. Pour cela, il faudra admettre, notamment, que l’éducation
n’est pas que l’expression de notre génie national et qu’il est possible, ensemble,
d’envisager une approche cumulative des connaissances. La constitution d’équipes
de recherche de tailles plus importantes qu’aujourd’hui, centrées autour d’objectifs
communs, constitue très certainement une étape essentielle. Dans cette
perspective, la question ne sera plus tant de savoir qui nous sommes et comment
nous afficher individuellement, mais ce que nous pouvons faire ensemble.
[1] J’ai par exemple tenté, en vain, d’additionner neuf cognitivistes, un informaticien, un statisticien, un mathématicien, un économiste, un philosophe, trois spécialistes des sciences de l’éducation et deux sociologues, mais le compte n’y est pas… il manque encore deux membres au Conseil scientifique, d’après les chiffres de Monsieur Pommier (https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=1969793153286030&id=1751992818399399).
[2] Rapport du Groupe de travail « tronc commun » de l’Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique et intitulé « Rapport sur l’implémentation d’un tronc commun dans l’enseignement obligatoire » (2018) http://www.academieroyale.be/academie/documents/RapportARB_tronccommun28093.pdf
[3] Groupe de travail sur le financement de l’enseignement supérieur en Communauté française de l’Académie royale de Belgique, premier rapport intermédiaire remis au Secrétaire perpétuel le 15 juillet 2011. http://www.cref.be/communication/20110715_Rapport_fin_Acad_royale.pdf
[4] Kahn P. (2006), « La critique du ‟pédagogisme” ou l’invention du discours de l’autre », Les Sciences de l’éducation – Pour l’Ère nouvelle, vol. 39, n° 4, p. 81-98.
[5] Kahn définit l’antipédagogisme comme « négation de toute valeur théorique et pratique à l’idée qu’il puisse y avoir un contenu propre, objectivable, cohérent et enseignable aux discours sur les manières d’enseigner, et, par voie de conséquence, le refus de tout propos constitué qui prend ces manières d’enseigner pour objet » (p. 83).
[6] On pourrait sans doute traduire cette expression par « argumentation des choix pédagogiques sur la base des éléments factuels et probants ». Cela n’exclut naturellement pas les réflexions axiologiques qui déterminent les finalités de l’éducation et de l’Ecole. Par exemple, voir à ce sujet le texte déjà ancien de Davies. Davies, P. (1999). What is evidence-based education ? British Journal of Educational Studies, vol. 47, n°2, 108-121. L’evidence based education n’y est pas décrite comme une panacée ou des recettes toutes faites… mais, comme le précise Davies, un ensemble de principes permettant de forger ses jugements professionnels et déployer son expertise.
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